CODEX XOLOTL

Dictionnaire des éléments constitutifs des anthroponymes et toponymes

Marc THOUVENOT (CELIA-CNRS) 
(1987 - révision 2004)

Voix: Alfredo RAMIREZ CELESTINO (DL-INAH)



Description du Codex

Le Codex Xolotl est constituée de dix planches et de trois fragments. Toutes ces parties sont faites d'un papier, qui est le support de graphismes et de couleurs auxquels ont été ajoutés des annotations, des estampilles et des étiquettes.

Papier
Des analyses effectuées récemment sur vingt-deux Codex mexicains de la Bibliothèque Nationale, dont le Xolotl, confirment que le support est un papier fait à partir de fibres de moracées, famille des mûriers et des figuiers. "Toutes le fibres prélevées sur les papiers d'écorce, quel que soit l'aspect du support fin ou épais, clair ou coloré, doux ou rugueux, ont présenté les caractéristiques des moracées...les fibres ayant un aspect morphologique semblable, nous n'avons pu déterminer de quelle espèce de moracée il s'agissait" [ F. Leclerc, 1984, p. 84.14.39]. C'est en tout état de cause un papier en écorce battue [Peut-être serait il possible de dire que le papier du Codex Xolotl est fait à partir des fibres d'un amacuahuitl: "arbre à papier", si l'on suppose que ce terme désigne une famille d'arbre, correspondant en gros aux Ficus et peut être aux moracées. J. de Durand Forest dans son étude du papier du Codex Borbonicus offre une synthèse des informations historiques disponibles sur ce thème.] communément appelé papier d'amatl. Il présente une surface un peu rugueuse, les fibres étant assez visibles. Il ne semble pas que la surface légèrement brune du papier ait été enduite. 

Dimensions
Toutes les planches ont des dimensions qui sans être absolument semblables sont cependant très proches. Les dimensions extrêmes pour la largeur sont de 49 et 47,5 cm et pour la hauteur de 41 et 41,7 cm. Seuls les fragments ont des largeurs inférieure à la norme [Le fragment 011 (ou 1.A) ne mesure que 20 cm de large sur 42 de haut, le 012 (ou 1.B) 28 de large sur 41,5 et le 013 (ou 1.C) 22 de large sur seulement 13 de haut.]. Alors que chaque planche est une unité graphique, les deux dernières forment un ensemble avec sur le coté droit, séparée par deux petites lignes, une partie supplémentaire. Cette ensemble mesure 96 cm de large sur 48 de haut.

Présentation 
Les planches du Codex se présentent de deux façons; certaines sont indépendantes avec une seule face couverte de dessins tandis que d'autres ont le recto et le verso utilisés formant des pages qui sont assemblées par une couture sur un des petits coté. Comme l'a noté C. Dibble chacune des pages reliées est donc formée de la réunion de deux planches [C. Dibble, 1948, p. 377-78]. Le Codex est relié de la quatrième jusqu'à la dixième planche, les trois premières et les fragments étant indépendants. Il n'en a pas toujours été ainsi car il fut une époque où les fragments étaient contrecollées au recto de la première planche. Ceci est visible par les traces de peintures qui subsistent au dos de cette planche et qu'il est possible de faire correspondre avec les fragments [Le fragment 011 était collé sur le coté gauche de la première planche (010) tandis que 012 se trouvait sur le coté droit. L'emplacement de 013 n'a pu être déterminé.]. 

Etat 
Dans l'ensemble le Codex est en assez bon état. Les parties ayant eu le plus à souffrir sont le pourtour des planches ainsi qu'une bande centrale verticale correspondant au fait que le document à du être conservé plié à une certaine époque. Certaines parties ont été endommagées assez récemment comme le montre la comparaison de la partie supérieure droite de la cinquième planche avec les photos qui ont été publiées dans l'Atlas de Boban [E. Boban, 1891, Atlas pl. 5 et aussi C. Dibble,1980, v.2, Pl. V. où les clichés en noir et blanc sont identiques à ceux de l'édition de Boban tandis que ceux en couleurs sont récents.].

Conservation 
Les trois premières planches ainsi que les fragments sont actuellement conservés sous rhodoïd alors que les autres, celles qui sont reliées, se trouvent dans une chemise cartonnée. Le verso des deuxième et troisième planches ne sont pas visibles car ils ont été contrecollés sur deux feuilles, l'une grise, l'autre blanche [La feuille blanche de la planche 030 est en fait le programme pour un spectacle qui a été récupéré]. L'ensemble fait partie des documents de la Réserve des Manuscrits Orientaux de la Bibliothèque Nationale de Paris, sous la cote 1-10.

Ces planches sont le support de graphismes, de couleurs, d'annotations, de signatures, d'estampilles et d'étiquettes. 

Graphismes 
Tous les traits sont tracés d'une encre, dont nous ignorons la composition, d'un noir très dense, dont l'apparence est proche de celle de l'encre de Chine. Ils servent à tracer des cadres, des personnages, des glyphes ou encore des liens. 
A la périphérie des planches, dont les bords ne sont pas trop abîmés, se distinguent de fines lignes rectilignes formant un cadre à l'intérieur duquel prennent place les dessins, certains de ceux-ci pouvant venir s'y appuyer. Alors que normalement ce cadre est très discret sur la deuxième planche il forme un véritable encadrement, car cette ligne est doublée à l'extérieur par une autre de 3 mm d'épaisseur [On peut se demander si cette ligne épaisse à l'extérieur du cadre n'aurait pas été ajoutée. D'une part cet encadrement n'existe que sur cette planche, qui a un moment donné à été séparée du reste du Codex et d'autre part la copie de Santiago du Chili ne comporte pas cette ligne].
A l'intérieur de cette limite sur toutes les planches sont dessinés des personnages, des glyphes et des liens. Personnages et glyphes sont disposés à la surface de chaque planche de manière à former des groupes dont certains sont unis les uns aux autres par l'intermédiaires de liens graphiques ou plastiques déterminant tout un réseau de relations et créant des récits [J. Galarza, 1972, p. 84]. 

Couleurs
Les formes crées par les personnages et les glyphes sont le siège de couleurs, mais celles-ci ne sont pas présentes sur toutes les planches. Seules les deux premières ainsi que les fragments sont intégralement colorées à l'aide de dix couleurs. Les troisième, quatrième, neuvième et dixième planche ne le sont que très partiellement tandis que de la cinquième à la huitième il n'y en a pas trace. Faute d'analyses la nature des colorants n'est pas connue.

Annotations
Graphismes et couleurs sont les deux composantes du document original. Des annotations, d'une ou plus vraisemblablement plusieurs mains inconnues, ont été ajoutées, peut être au XVIème siècle, à proximité d'un certain nombre de glyphes. Ces annotations, en nahuatl, sont généralement très brèves, seules les deux premières planches présentant de petits textes. Il n'y qu'une phrase, se trouvant au verso de la dernière planche qui n'est pas directement associée aux dessins [Cette phrase est malheureusement en partie obscure et effacée au début: ixhua... inachcocol.. Ixtlilxochitzin...yhiniachcocol.. chichimeca xolotl ihuan nopaltzin: "...... ixtlilxochitzin...les Chichimèques de xolotl et nopaltzin". Elle est suivie de quelques mots presque complètement disparus dont on ne distingue que : mic...... et acan......]. 

Signatures
Il y a par ailleurs des signatures de différents collectionneurs ayant eu à un moment donné ce Codex: au verso du deuxième fragment se trouve celle de J.M.A. Aubin faite à Mexico en 1832 qui est rayée et remplacée par celle de E. Eug. Goupil, Paris, 1889. Au verso de la deuxième planche celles de J.F. Waldeck et de E. Eug. Goupil. Les mêmes signatures s'observent au verso de la troisième planche. Au verso de la dernière planche E. Goupil à écrit "Appartenant à E. Eug . Goupil , Paris 1889" et a signé. 
En plus de ces signatures se trouvent quelques données manuscrites faisant référence à l'intégration du Codex dans une vaste collections ou constituant un renvoi à d'autres documents. On trouve indiqué au verso du premier fragment: "1er Volume f. 95", "1er Volume f. 98 à 111" au dos de la deuxième planche, "1er Volume f. 114 à 124" au dos de la troisième et sur le recto de la dernière "1er Volume f. 198 à 204".

Estampilles et étiquettes
Au moment de l'incorporation du Codex dans le fonds des manuscrits mexicains de la Bibliothèque Nationale chacune des planches a reçu, avec plus ou moins de régularité, plusieurs estampilles. L'une mentionne le nom des deux précédents collectionneurs, A. Aubin et E. Goupil, et le numéro de la planche ajouté en chiffre arabe. Une autre est marquée "Bibliothèque Nationale République Française", une autre enfin est un estampille de don, qui n'a pas été remplie. Tout ceci est complété par des étiquettes rondes sur lesquelles sont inscrits en chiffres arabes les numéros des planches. A tous ces ajouts qui viennent troubler l'aspect des planches il faut encore ajouter que les seconde et troisième planches portent, marqué au fer, le nom de Waldeck. 
Plusieurs noms de collectionneurs ont été déjà mentionnés cela laisse supposer que le Codex Xolotl est passé par de multiples mains avant de se trouver à la Bibliothèque Nationale de Paris. Sans vouloir faire un historique complet des tribulations de ce document il est cependant nécessaire d'en indiquer les moments les plus importants en mettant, en particulier, à profit la présentation qu'en fit C. Dibble [C. Dibble, 1980, p. 11-14] . 

Pérégrinations du Codex 
Deux grandes périodes peuvent être distinguées dans les déplacements du Codex: celle qui va du moment de sa création jusqu'à ce qu'il parvienne entre les mains d'Alva Ixtlilxochitl, puis celle qui sépare ce premier possesseur connu de la Bibliothèque Nationale. La première est pleine d'incertitudes, la seconde en comporte un peu moins.
Le Codex a été rédigé dans un moment et dans un lieu donnés avant de passer de mains en mains.
Origine
Parler de l'origine du Codex revient à évoquer la date et le lieu de sa rédaction: s'il est difficile de se prononcer sur ce sujet il est au moins possible de fixer des bornes logiques. Le Codex ne peut pas être antérieur à la dernière date mentionnée par le document, soit 1429, et il ne peut être postérieur au moment où Alva Ixtlilxochitl a commencé à rédiger ses divers écrits, soit, selon l'étude de O'Gorman, 1608 [A. Ixtlilxochitl, E. O'Gorman, p. 229]. Cent quatre-vint ans séparent ces deux dates, de plus à peu près à la moitié de cette période se situe la conquête espagnole. Est-il possible d'assigner une date précise à l'écriture du Codex à l'intérieur de ce laps de temps ? 
Selon le premier possesseur connu du Codex, celui-ci aurait a été rédigé à l'époque correspondant à la fin des récits. Alva Ixtlilxochitl attribue en effet sa paternité à deux personnages figurant sur la dernière planche du Codex [A. Ixtlilxochitl, 1977, p. 76: "la Historia general del imperio de los chichimecas" cuyos autores se decían el uno Cemilhuitzin y el otro Quauhquechol"], par ailleurs quand cet auteur se réfère à ce document il emploie très souvent l'expression "original y antigua historia" [A. Ixtlilxochitl, 1975, p. 371]. Le fait que les auteurs se trouvent mêlés à des événements datés de 1429 ne signifie pas nécessairement qu'ils aient rédigé le Codex à cette même époque. Il pouvaient très bien être jeunes alors qu'ils étaient acteurs de l'histoire et ne l'avoir écrite que dans leur vieillesse. Si l'ont tient compte des dires d'Alva Ixtlilxochitl cela donne une fourchette approximative allant de 1429 à environ 1480. 
Pour C. Dibble "il est logique de penser que le Codex fut peint vers le milieu du XVIéme siècle car il conserve un style très semblable à celui de la Mapa Quinatzin ou de la Mapa Tlohtzin. A l'exception des caractéristiques européennes déjà mentionnées, le Codex conserve admirablement le style de l'art indigène de la région de Texcoco" [C. Dibble, 1951, p. 12: "Es lógico pensar que el Códice fué pintado a mediados del siglo diez y seis; puesto que conserva un estilo muy semejante al Mapa Quinatzin y al Mapa Tlotzin. Con la excepción de las características europeas ya mencionadas, el Códice conserva admirablemente el estilo del arte indígena de la región de Texcoco"]. Cet auteur envisage une hypothèse complémentaire, à la suite de W. Lehmann: le Codex Xolotl pourrait être une copie d'un document plus ancien qui lui aurait été rédigé, comme l'indique Alva Ixtlilxochitl, à l'époque de nezahualcoyotl [Ibid. p. 11-12]. 
Le seul argument avancé par C. Dibble pour donner une date postérieure à la conquête au Codex est d'ordre stylistique: "on note l'influence européenne dans la manière de représenter le soleil et la bannière, et l'on voit aussi comment les étoiles et les arbres montrent cette même influence" [Ibid. p. 11: "Se nota la influencia europea en la manera de representar el sol y la bandera, y se ve también cómo las estrellas y los árboles muestran esa misma influencia"]. Rien dans l'analyse des quatre éléments en cause (tonatiuh: "soleil", pantli: "bannière", citlalin: "étoile" et cuahuitl_01: "arbre" ne nous semble justifier une telle assertion. Par ailleurs pour que cet argument soit retenu il faudrait expliquer la raison pour laquelle seulement 1% des éléments aurait subi une influence extérieure à la tradition autochtone et indiquer de quelle mystérieuse protection les autres auraient bénéficiée. 
Dès l'instant où nous n'adhérons pas à l'idée de C. Dibble, et pensons que rien dans le document lui-même ne peut aider à établir sa date d'exécution, il ne reste plus que trois solutions: 
- renoncer à dater le Codex. C'est un peu ce que fait D. Robertson lorsque après avoir étudié d'un point de vue stylistique non seulement le Codex Xolotl mais aussi deux autres documents pictographiques de "l'école de Texcoco", la Mapa Quinatzin et la Mapa Tlohtzin. Pour lui la date du Xolotl est inconnue, il pense seulement que son exécution est antérieure à celle des deux Mapas, qu'il situe entre 1542-46 [D. Robertson, 1954].
- adopter le point de vue d'Alva Ixtlilxochitl et dire qu'il a été écrit vers la moitié du XVéme siècle.
- diviser le problème en adoptant l'hypothèse de W. Lehmann. C'est à dire tenir le Codex pour une copie d'un original inconnu. L'absence d'homogénéité du Codex, sous le rapport des couleurs, certaines planches en comportant d'autres un peu ou pas du tout, et le fait que certaines pages soient reliées sont les seuls arguments pouvant laisser croire qu'il s'agirait là d'une copie inachevée d'un original. Mais le problème ne fait que se compliquer car il faut alors supposer qu'un "original" doit toujours être homogène et comporter toutes les couleurs et que les Codex n'étaient jamais reliés. Prouver ces deux assertions ne nous semble pas possible. Par ailleurs de le tenir pour une copie n'indique rien quand à la date de sa réalisation car comme l'indique J. Galarza "originaux et copies existaient avant comme après celle-ci (la conquête)" [J. Galarza y R. Maldonado Roja, 1986, p. 52: "originales y copias existían antes como después de ésta"].
Face à l'impossibilité de trancher la double question de la date de réalisation et de la nature du Codex nous considérons, en tenant compte de l'avis d'Alva Ixtlilxochitl, que le Codex date plus ou moins directement, selon qu'il s'agit d'un original ou d'une copie du XVème ou du XVIéme, du XVème siècle comme le dit son premier possesseur connu.
A dire vrai la question, par rapport au but fixé dans ce travail, est de peu d'importance. Supposons que le document utilisé par Alva Ixtlilxochitl, et aujourd'hui nous même, ait été exécuté au début du XVIIème siècle. La seule question qui se pose est de savoir si l'exemplaire que l'on connaît, est fidèle, c'est à dire s'il est d'une exécution parfaitement traditionnelle. Rien dans l'analyse des glyphes ne nous a permis de penser le contraire et de plus Alva Ixtlilxochitl ne fait pas mystère de la confiance que lui inspire ce document. 
En ce qui concerne le lieu de rédaction du Codex tout porte à penser qu'il s'agit de Texcoco et que son premier lieu de conservation était les Archives Royales de cette cité. Trois raisons incitent à le croire: - Le thème évoqué, centré autour de Texcoco et de la lignée de ses souverains. 
- le premier propriétaire privé connu du document, Alva Ixtlilxochitl, était un descendant de nezahualcoyotl. Son trisaïeul, Fernando Cortés Ixtlilxochitl, était lui-même fils de nezahualpilli, et petit-fils de nezahualcoyotl [O'Gorman dans Alva Ixtlilxochitl, 1975, p. 9-10].
- enfin Alva Ixtlilxochitl, sans cependant désigner expressément ce document, indique que: "en la ciudad de Tetzcuco estaban los archivos reales.... y de lo que escapó de los incendios y calamidades referidas, que guardaron mis mayores, vino a mis manos, de donde he sacado y traducido la historia que prometo.." [Alva Ixtlilxochitl, 1975, p. 527]. 
Une hypothèse selon laquelle le Codex aurait été exécuté à, ou par un tlacuilo de, Cohuatlichan a été formulée par H.B Nicholson, à la suite d'une citation de Torquemada [H.B. Nicholson, 1972, p. 163-64 et Torquemada, 1969, I,126] qui évoque deux documents pictographiques, l'un de Cohuatlichan et l'autre de Texcoco. Cette possibilité n'est pas retenue car Alva Ixtlilxochitl, qui cite ses sources, ne fait jamais mention ni de documents écrits ni surtout de contacts qu'il aurait pu avoir avec des personnages de cette cité [Alva Ixtlilxochitl, 1975, p. 285-86]. 

Du XVIIème au XXème siècle
Le Codex Xolotl fait sa première apparition indirecte dans les écrits d'Ixtlilxochitl. Il ne parle bien évidemment pas de ce Codex en utilisant cette dénomination moderne mais en employant plusieurs expressions dont on a tout lieu de penser qu'elles font référence à ce document pictographique. Nous supposons qu'Alva Ixtlilxochitl demeure en possession du Codex jusqu'à sa mort en 1650. C'est son fils Juan de Alva Cortés qui en hérite et qui lui même a sa mort le lègue à Don Carlos de Sigüenza y Góngora. Cette transmission est hautement probable si l'on considère ce que dit un auteur du XVIIIème, Eguiara y Eguren: "Carolus (de Siguenza) réussit à très grands frais et avec beaucoup de peine à recueillir plusieurs volumes de différents documents de ce genre. Le plus précieux de ceux-ci provenaient d'un don peu connu fait par D. Joannis de Alva (Ixtlilxochitl) indien de bonne éducation descendant de la famille royale de Tezcuco qui en avait hérité de ses ancêtres et connaissant leur valeur les avaient précieusement gardés. Etant donné les étroites relations qui l'unissaient au nôtre (Sigüenza), il désira que celui-ci devint son exécuteur testamentaire et il en fit en même temps l'héritier de ses célèbres feuillets et de ses livres de choix" [Eguiara y Eguren: "Bibliotheca Mexicana, Tomus Primus, Mexiccii, 1755, fol. 471-472, cité par E. Mengin "Corpus Codicum Americanorum", Vol III, 1949, p. 16]. Sigüenza meurt en 1700 et comme l'indique J. de Durand-Forest "il légua toute sa bibliothèque et sa collection de Manuscrits à la Bibliothèque du Collège Jésuite San Pablo y San Pedro de Mexico" [J. de Durand-Forest, 1976, p. 9]. De là le Codex passe aux mains du "chevalier Lorenzo Boturini Benaduci..".qui, comme le dit J. Soustelle "arriva au Mexique en 1736...doué d'une intense curiosité et d'une activité peu commune, Boturini s'éprit du Mexique et de son passé; en sept ans, il réussit à réunir une magnifique collection de documents authentiques.." [J. Soustelle, 1968, p. 40]. Nous ne savons pas précisément comment le Codex passa de son possesseur précédent à Boturini, mais la description que ce dernier en donne ne laisse aucun doute sur le fait qu'il faisait bien partie de sa collection [Ce texte est cité par E. Boban, 1891: "Historia Chichimeca Original: un mapa de exquisto primor en papel indiano, como de marca mayor, donde se vén, con figuras y caracteres, historiados los principios de le Imperio Chichimeco, des de Xolotl, hasta Nezahualcoyotl despues que recuperó el Imperio del poder del Tirano Maxtlaton. Tiene 6 fojas y 10 paginas utiles en un todo pintadas, cuyas dos primeras llevan insertos unos renglones en lengua nahuatl casi borrados de la antiguedad. Tuvo este mapa en liberia (sic) el mencionado don Fernando Ixtlilxochitl, y le sirvio para escribir la historia del mismo imperio, como consta de testimonio"]. Celle-ci, a la suite de déboires de Boturini, qui est arrêté en 1743 et voit ses biens confisqués, passe d'institution en institution en diminuant un peu à chaque fois [Selon R. García Granados, dans la Préface qu'il consacra à l'ouvrage de C. Dibble, en 1951, de la collection de Boturini le Codex Xolotl serait passé entre les mains de Don Mariano Fernández de Echeverría y Veytia, mais comme il le note lui-même, ainsi que C. Dibble (p. 13), ce dernier ne l'aurait pas utilisé. Il est donc bien possible que Veytia ne soit pas un maillon de cette chaîne allant d'Alva Ixtlilxochitl jusqu'à la Bibliothèque Nationale de Paris]. 
Alors que six inventaires successifs de la collection ont été réalisés -en 1743, 1746, 1791, 1804, 1823 et 1917-18 [J.B. Glass, 1975, p. 482]- le Codex Xolotl n'est mentionnée que dans les deux premiers, ensuite sa trace est perdue. Il réapparaît indirectement entre 1771 et 1788, époque à laquelle, selon J. B. Glass, León y Gama en établie une copie. Au dos de la première planche de celle-ci, il est indiqué que le Codex se trouvait alors à la "R(eal) Universidad con el numero 3". Le fait que les deuxième et troisième planches soient absentes de cette copie indique qu'entre temps ces dernières avaient été séparées de l'ensemble. Il faudra attendre 1831, date à laquelle, toujours selon J.B. Glass, Jean Frédéric Maximilien de Waldeck en fait l'acquisition à Mexico [J.B. Glass, 1975, p. 463], pour les voir resurgir. Le reste du Codex n'est pas localisé entre le moment où Léon y Gama en fait une copie jusqu'à ce que "Joseph Marie Alexis Aubin, directeur de la Section des Sciences de l'Ecole Normale Supérieure de Paris...chargé en 1830 d'une mission scientifique au Mexique.... entreprit de rassembler des documents originaux, en particulier ceux de la collection à demi-dispersée de Boturini" [J. de Durand-Forest, 1976, p. 11]. Selon E. Boban, A. Aubin aurait acheté le Codex Xolotl avec tout un ensemble de documents appartenant à la collection Boturini, "au couvent de San Francisco de Mexico" [E. Boban, 1891, p. 44]. En 1840 ce collectionneur rentre en France, en dissimulant ses documents au passage de la douane [Ibid. p. 14], et "à Paris, M. Aubin apprit que M. de Waldeck possédait aussi plusieurs manuscrits mexicains. Il alla le voir et eut la chance de pouvoir acheter les deux feuilles qui manquaient..." [E. Boban, 1891, p. 103]. A cette date le Codex est donc de nouveau complet. La fin du périple est contée par J. de Durand-Forest: "En 1889, soit deux ans avant sa mort, Aubin, ruiné, dut vendre sa collection à Eugène Goupil, qui chargea par la suite Ernest Boban d'en dresser le Catalogue. A la mort de Goupil, sa veuve fit don de la collection à la Bibliothèque Nationale de Paris, en Juin 1898". 

L'ordre original des planches
La présentation du Codex Xolotl faite précédemment se réfère à son état actuel mais celui-ci ne correspond pas exactement à la disposition des planches dans le passé.
C. Dibble a étudié tout particulièrement cette question et il indique que les deuxième et troisième planches actuellement indépendantes et montées sur un papier fort, à la suite de leur séparation de l'ensemble, sont les deux faces d'une même page. Par ailleurs il suppose que les fragments, actuellement indépendants et originellement collés au recto de la première planche, seraient les morceaux restants des deux faces d'une autre page. A partir de cette supposition il propose l'ordre suivant: 
Page 1: Planche 1 (X.010) avec un coté sans peintures servant de couverture.
Page 2: fragment 1A (X.011) et fragment 1B (X.012) dos à dos
Page 3: Planche 2 (X.020) au recto et Planche 3 (X.030) au verso. 
Page 4: Planche 4 (X.040) au recto et Planche 5 (X.050) au verso.
Page 5: Planche 6 (X.060) au recto et Planche 7 (X.070) au verso.
Page 6: Planche 8 (X.080) au recto et Planche 9 (X.090) au verso.
Page 7: Planche 10 (X.100 + X.101) au recto, le verso étant sans peinture et servant de couverture [C. Dibble, 1948, p. 379].

Avec cette reconstruction de l'ordre des pages et des planches C. Dibble considère délibérément le Codex Xolotl comme un ensemble homogène. Nous ne partageons pas ce point de vue car les fragments, qui selon C. Dibble auraient constitué la deuxième page, sont, semble-t-il, des parties d'un autre document. L'habileté des peintres-écrivains et la force des conventions étaient telles qu'il est extrêmement difficile de dire si toutes les planches du Codex sont l'ouvre d'un seul tlacuilo. En tout cas pour toutes les planches complètes rien ne nous permet de supposer le contraire. Par contre en ce qui concerne les fragments il n'en va pas de même. La différence la plus évidente touche les couleurs, des glyphes et de tous les personnages. Alors que sur la première planche (X.010) et la seconde (X.020) les personnages masculins sont tous bis tandis que les femmes sont toutes brunes, sur les deux fragments cette disposition des couleurs est inversée. Par ailleurs deux variantes graphiques n'apparaissent que sur les fragments: l'une concerne un élément tecpatl: "silex" qui est figuré avec un manche, alors que le couteau de silex n'est jamais emmanché dans tous les autres glyphes du même type des autres planches; l'autre un élément chalchihuitl: "jade" figuré selon une disposition quadripartite, disposition qu'il n'a nulle part ailleurs dans ce Codex [M. Thouvenot, 1979, p. 15]. 
A la suite de ces deux observations les fragments sont tenus pour des parties d'un autre Codex écrit par un autre tlacuilo que celui ou ceux responsables de tout le reste du Codex Xolotl. Déjà à l'époque d'Alva Ixtlilxochitl ces morceaux avaient du être récupérés pour servir de couverture à la première planche du Codex, puisque la recherche des citations permet de savoir que cet auteur n'en avait pas connaissance [Les fragments sont en tout cas restés collés jusqu'à l'époque où Boban étudia le Codex, il dit en effet: "Le frottement, l'usure des bords ayant légèrement séparé ces deux feuilles collées l'une sur l'autre, en les écartant un peu, à l'angle supérieur droit, nous nous apercûmes que la deuxième avait été peinte sur son coté intérieur: le peintre chroniqueur, mecontent sans doute de son travail, en fit une couverture. La partie sur laquelle se trouvait l'écriture figurative fut donc enduite de colle et fixée sur le recto du tablea No1; cette enveloppe a protégé une partie des figures, et les couleurs en sont aussi vives que si elles venaient d'être appliquées". E. Boban, 1891, I, p. 95]. L'ordre originel des planches visibles serait donc: 
Page 1: recto: couverture / verso planche 1 (X.010)
Page 2: recto: planche 2 (X.020) / verso planche 3 (X.030)
Page 3: recto: planche 4 (X.040) / verso planche 5 (X.050)
Page 4: recto: planche 6 (X.060) / verso planche 7 (X.070)
Page 5: recto: planche 8 (X.080) / verso planche 9 (X.090)
Page 6: recto: planche 10 (X.100 + X.101) / verso couverture

Cet ordre des planches correspond sans doute à l'état dans lequel se trouvait le document entre les mains d'Alva Ixtlilxochitl, il s'accorde en tout cas à la description qu'en donne Boturini: "tiene 6 fojas y 10 paginas utiles" [cité par E. Boban, 1891]. 
Actuellement les pages 3, 4, 5 et 6 sont reliées par un fil sur un des petits cotés. Cela correspond-t-il a la disposition originale des pages ? L'ensemble, avant que la page 2, celle portant les deuxième et troisième planches, n'en soit désolidarisée, n'était-il pas ainsi lié ? Cela est probable mais il n'est pas possible de le vérifier en étudiant les marges de ces planches car elles sont trop endommagées. Si l'ensemble des planches étaient reliées au moment où Alva Ixtlilxochitl se servait du Codex cela ne suffirait-il pas à montrer que la disposition générale du document serait postérieure à la conquête ? J.B. Glass apporte une prudente réponse à cette question: "les informations actuelles indiquent que les formes ou formats méso-américain d'avant la conquête ne comprenait pas la forme en codex". Le mot codex signifiant ici "livre manuscrit dont les feuilles sont cousues d'un coté" [J.B. Glass, 1975, v. 14, p. 8]. 

Reproductions
Graphiques
Copie de León y Gama
A la fin du XVIIIème siècle le "savant astronome et archéologue mexicain León y Gama" [E. Boban, 1891, p. 207] fait une copie du Codex, à l'exception des planches 2 (X.020) et 3 (X.030), qui à cette époque étaient donc déjà séparées de l'ensemble, et des trois fragments. Ces reproductions sont faites sur de grandes feuilles de papier mesurant 54cm sur 38. Les planches ont du être pliées en deux, comme le Codex lui-même, car elles sont un peu endommagées au centre. Elles sont conservées par la Bibliothèque Nationale de Paris sous le numéro 10 bis [Sous ce même numéro figure aussi un document pictographique qui n'a aucun rapport avec le Codex Xolotl]. Toutes les planches sont indépendantes et conservées sous rhodoïd [Sur la feuille qui sert de couverture on lit dans l'angle supérieure gauche une légende en nahuatl, copie de celle qui se trouve au verso de la dernière planche du Codex: "ixhuatzin inach cocoltzin ixtlilxochitzin no y...cocoltzin chichimeca xolotl, ihuan nopaltzin" puis en dessous le texte suivant: "Copia de un mapa antiquissimo de papel de maguey que se halla en la R(eal) Universidad con el numero 3 del invetario 3°. en 8 paginas del tamaño de este papel de marca, muy apolillado roto y en muchas partes despintado. Tiene algunas notas en lengua mexicana ya borradas con el tiempo; de las quales se han copiado las que á costa de gran trabajo se han podido percevir. Contiene la historia de la venida del el Emperador Chichimeca Xolotl" E. Boban, 1891, I, p. 207]. Comme l'original elles comportent de nombreuses estampilles et étiquettes. 
Cette copie se distingue de l'original essentiellement par la médiocrité de son graphisme et par une utilisation parfaitement irrationnelle des couleurs, dont beaucoup sont simplement inventées. Par ailleurs elles comportent de multiples annotations. Certaines sont les copies par León y Gama de celles figurant sur le Codex, d'autres sont dues à des mains différentes, au moins trois, en particulier celle d'Aubin qui par ses annotations montre qu'il a utilisé les écrits d'Alva Ixtlilxochitl, de Torquemada, Tezozomoc, Veytia et un Dictionnaire Historique!
Cette copie est restée avec le Codex puisqu'elle a fait partie de la collection d'Aubin avant de parvenir à la Bibliothèque Nationale de Paris, par l'intermédiaire d'Eugène Goupil et de sa veuve.
La copie de León y Gama, du fait de la faible qualité de son exécution, n'a été mise à profit que pour vérifier certains glyphes endommagés du Codex mais jamais pour remplacer un glyphe complètement effacé de l'original.

Copie de Santiago du Chili
Ce document ne correspond qu'à une planche du Codex, la deuxième ou 020. Cette copie, exécutée sur parchemin, dont l'actuel détenteur n'est pas connu, a été étudiée, sur reproduction par C. Dibble, et ultérieurement directement par C. Lizardi Ramos, à la demande du Directeur de l'Instituto Nacional de Antropología et Historia de Mexico en 1962 [C. Lizardi Ramos, 1968, p.131-148]. Bien que présentant un style un peu européanisé et faisant preuve de bien des incompréhensions et erreurs, comme l'indique l'auteur qui a pu l'observer, cette copie présente l'avantage de figurer des parties qui ont à l'heure actuelle disparu de la planche originale. C. Dibble envisage deux moments où cette copie aurait pu être faite: soit à l'époque où la deuxième planche, 020, a été séparée du reste du Codex, dans la seconde partie du XVIIIème, soit au XVIème dans la mesure où la copie ne comporte pas les annotations qui apparaissent sur l'original [cité par C. Lizardi Ramos, 1968, p. 145]. 
Cette copie n'ayant été reproduite qu'à une échelle très réduite elle n'a pas été utilisée dans cette étude.

Photographiques 
E. Boban, 1891
La première reproduction photographique complète du Codex est celle qui se trouve dans la partie nommée Atlas de l'ouvrage de E. Boban. Malgré une réduction assez importante par rapport à l'original, la qualité des clichés et de l'impression en font toujours un outil de travail possible. Il y manque cependant les trois fragments et surtout toutes les planches sont en noir et blanc. 
C. Dibble, 1951
La deuxième édition du Codex est celle qu'en fit C. Dibble en 1951. Les reproductions sont toujours en noir et blanc, d'une dimension intermédiaire entre celles de Boban et l'original, elles comprennent les fragments. Les mêmes photos sont utilisées pour assurer la codification des glyphes à l'aide d'un quadrillage. De plus à la suite de chacune des planches est reproduite la copie correspondante de León y Gama. 
C. Dibble, 1980
La troisième édition est celle de C. Dibble datée de 1980. Il s'agit d'une réédition de la précédente, mais là les planches du Codex sont reproduites en couleur [L'auteur de la préface de cette seconde édition, M. León-Portilla, mentionne en note une autre édition en couleur datant de 1975 dans Memoria de las Obras del sistema de drenaje profundo del Distrito Federal, 3 v. México, Talleres Gráficos de la Nación. Cette édition n'a pas été consultée]. 



xolotl 100 %

Nombre de planches :14
Nombre de zones :117
Nombre d'éléments :347
Nombre de formes : 55
Nombre de glyphes : 2367
Nombre d'éléments des glyphes : 5244
Nombre de citations : 3257
Nombre de valeurs phoniques des glyphes : 5276
Nombre de mots nouveaux des glyphes : 1380
Nombre de parties exprimées par un personnage, dans les glyphes : 76
Nombre de parties non-exprimées, dans les glyphes : 706
Nombre de personnages : 0
Nombre d'éléments des personnages : 0
Nombre de citations des personnages : 0
Nombre de valeurs phoniques des personnages : 0
Nombre de mots nouveaux des personnages : 0
Nombre de mots exprimés par des glyphes, pour les personnages : 0
Nombre de mots non-exprimés, des personnages : 0
Nombre de mots dans le dictionnaire : 1964
Nombre de racines dans le dictionnaire : 5138
Nombre de traductions dans le dictionnaire : 2217


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